Le 5 juin 2015, nous avons débuté le GR20 dans le sens Sud – Nord à partir du village de Conca. Ce billet est le récit de notre troisième journée de randonnée sur le GR20 d’Asinau à Usciolu, en passant par l’ancien tracé du GR20. Il est la suite de GR20 : Paliri à Asinau.
Étape 3 : du refuge Asinau au refuge Usciolu
Réveil à 4h30. Encore une fois, les prévisions météo n’étant pas très optimistes pour l’après-midi, nous préférons décamper tôt et ainsi augmenter nos chances de survie. Nous avons décidé de ne pas suivre le nouveau tracé du GR20, qui nous forcerait à descendre vers Mataza et à remonter ensuite, ajoutant une journée de marche supplémentaire. Grâce à l’ancien tracé, nous nous rendrons directement au prochain refuge : Usciolu. Mais il faut savoir que l’étape annoncée est ponctuée de longues traversées sur des crêtes exposées à éviter en cas d’orages, qui éclateront fort probablement en après-midi. Nous serons donc en mode «sauve-qui-peut» pour une deuxième journée consécutive. Heureusement que mamie et papi se sont couchés tôt hier !
Étape 3 : Asinau – Usciolu (par l’ancien GR20)
Durée : 9h00
Distance : 17 km
Dénivelé positif : 1065 mètres
Dénivelé négatif : 845 mètres
Quand le soleil dit bonjour au Monte Incudine
Notre petit-déjeuner est constitué d’une montée des plus abruptes via des passages délicats, entre des rochers à escalader et des dalles inclinées à franchir sans réel point d’appui, pour un total de 600 mètres de dénivelé. Pour nous, amateurs de montée et de défis, c’est une vraie partie de plaisir, même si on lâche quelques « ben voyons donc ! » à la vue du sentier tortueux. Nous franchissons cette première étape en fredonnant le hit Quand le soleil dit bonjour aux montagnes avant même que les rayons ne chauffent le sommet du Monte Incubine, une sorte d’appel au soleil pour éloigner les orages. En atteignant la cime culminant à 2 134 mètres d’altitude, nous croyons alors avoir complété la portion la plus difficile de la journée et célébrons notre victoire à grand coup de Nutella. C’était bien mal connaître le GR20.
Nous marchons quelque temps sur des crêtes arrondies et traversons notre premier névé sans difficulté (en tant que Québécois, on s’y connaît) avant d’amorcer notre descente dans la vallée. Bien que la pente soit douce, des petits cailloux instables me forcent à ralentir la cadence pour épargner mes genoux. Pour le moment, ils sont toujours top shape grâce à mes bons soins, il ne faudrait pas tout gâcher ! J’ai aussi fait la triste découverte d’une première ampoule ce matin – la seule et unique depuis l’achat de mes bottes de randonnée Vasque en 2012. Ce sera donc un mode « sauve-qui-peut » mais pas trop.
Plat, pozzines et ruisseaux
Nous arrivons finalement à la rivière Forcinchesi, où nous espérons nous arrêter pour manger, se baigner et faire une petite sieste à l’ombre des arbres. Or, les rives sont occupées par des troupeaux de vaches et le sol est jonché de cadeaux. On tourne en rond à la recherche d’un coin de paradis, pour finalement se poser sous la passerelle de Pedinielli. À peine avons-nous retiré nos bottes pour se tremper les gros orteils que le tonnerre commence à gronder. Dans le ciel, les nuages orageux font la course. Tant pis pour la sieste, nous reprenons la marche.
Et nous marchons, marchons et marchons, dans cette vallée qui n’est ni belle, ni intéressante, sauf pour les pozzines, ces étendues invitantes de tourbières vertes. Il ne pleut toujours pas, mais le ciel ne cesse de gronder et les degrés montent, signent annonciateurs d’une tempête imminente. Nous arrivons finalement à une source, où des gardes forestiers nous mettent en garde contre les orages qui arrivent. Nous décidons tout de même de poser nos sacs quelques minutes pour fermer les yeux, histoire de reprendre des forces.
À peine ai-je posé ma tête sur le sol que je m’assoupis, pour me réveiller une dizaine de minutes plus tard, un tantinet ragaillardie. Selon notre interprétation de la carte et notre « traduction » sommaire du topo-guide allemand, il ne nous reste que très peu de kilomètres à parcourir et des punaises en dénivelé positif. Ça va le faire !
La grande surprise : les crêtes A Monda
N’ayant plus rien d’une gazelle, je progresse lentement pendant cette dernière montée, en gardant toutefois bon espoir de voir le refuge apparaître très bientôt. Or, une fois en haut, nous avons la surprise d’être de retour sur une crête. Loin d’être arrondie, elle est plutôt anguleuse à l’extrême, au point où j’ai moi-même quelques craintes, alors que normalement je suis celle qui prend les devants sur les terrains plus vertigineux. Bon, ça ne devrait pas durer très longtemps tout ça. Si nous ne prenons pas de pause, nous devrions y être dans une trentaine de minutes. Nous l’espérons fortement, parce que le tonnerre gronde maintenant tout près. Autour de nous, les sommets sont tous couverts d’épais nuages traversés par des éclairs menaçants.
Cette vue, c’est pire – ou mieux, c’est selon – qu’un coup de pied au cul. Je n’ai pas l’intention de mourir foudroyée par un éclair, et ce malgré mes airs de paratonnerre avec mes bâtons de marche dans les mains sur ce massif sans végétation. F**k les genoux, f**k l’ampoule, sauve-qui-peut. Je fourre l’appareil photo dans mon sac et je cours maintenant aussi vite que possible sur cette crête abrupte avec un sac de 12 kilos sur le dos. Tantôt nous escaladons, tantôt nous enjambons la crête d’un côté et de l’autre, avec nos seuls doigts usés et fatigués pour s’agripper. Tout va tellement vite que Francis n’a même plus le temps d’avoir peur du vide.
Nous rejoignons bientôt Philippe, Thierry, Anne-Caroline et Julie. Je suis rassurée de les retrouver, d’autant plus que nous n’étions plus que deux, nos équipiers ayant décidé de marcher plus lentement. D’ailleurs, nous commençons à nous faire du souci, puisque nous n’arrivons plus à les repérer sur la crête. Ils ne sont probablement que du côté opposé, mais l’inquiétude nous gagne petit à petit. Nous ralentissons, en jetant des coups d’oeil vers l’arrière de temps à autre, jusqu’à ce qu’un coureur ultra trail nous double. Il nous confirme que nos amis progressent toujours, avec seulement une quinzaine de minutes de retard derrière.
Le refuge Usciolu
Après deux heures à chevaucher la crête sous des rafales de vent violentes, nous atteignons finalement le refuge Usciolu, juché à 1750 mètres d’altitude. Anticipant une averse monstre, nous décidons de piquer la tente rapidement. Tout un cirque avec un tel vent, mais nous y arrivons. Cerise sur le sundae : nos amis surgissent enfin. Avant de passer à table tous ensemble, nous profitons d’une bonne douche gelée dans une cabane dont les murs troués laissent passer les coups de vent. Que du plaisir !
Après l’assiette de pâtes à l’eau froide que nous engloutissons en moins de deux, nous n’avons qu’une seule envie : retrouver le confort douillet de notre tente. Au diable la lessive de la journée et la rédaction de notre journal de bord. À défaut de mettre par écrit cette journée éprouvante mais ô combien riche en paysages spectaculaires, nous en rêverons.
Pour lire la suite, c’est par ici : GR20 de Usciolu au Col di Verde !
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[…] Pour lire la suite, c’est par ici : GR20 de Asinau à Usciolu ! […]
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[…] Ce billet est la suite de GR20 de Asinau à Usciolu. […]
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tellement contente de lire votre histoire surtout quand on sait ce qui s’est passé pas très loin de vous.
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Han…déjà fini ce récit…j’étais partie pour en lire au moins une heure…bon bin…je vais attendre le prochain…j’attends……………………
7 commentaires sur «GR20 d’Asinau à Usciolu»