Si tu me demandais qui m’a appris à aimer le plein air, je te parlerais de ma cousine Karine. J’ai vécu avec elle mes premières aventures de camping et j’ai trouvé sa passion contagieuse dès les premières fois. C’était il y a bien longtemps, mais aujourd’hui ses aventures en famille sont une inspiration pour moi et peuvent très certainement l’être pour beaucoup d’autres.
Après avoir donné naissance à deux enfants, Karine n’a pas remisé sa tente et son sac à dos. Ensemble, la petite famille a déjà réalisé quelques voyages à vélo et une expédition de canot-camping. Je lui ai parlé pour en apprendre davantage sur ses trucs et astuces pour partir à l’aventure avec de jeunes enfants.
Entretien avec Karine, mère aventurière
FG Tu as toujours été intéressée par les aventures en plein air. D’où te vient cet intérêt ?
Mon amour pour la nature vient sans aucun doute de mes sorties en forêt avec mes parents. Déjà jeune je me souviens partir de longues heures en forêt à la conquête d’un gibier et à 14 ans j’étais à dormir dans une tente à -50 degrés pour la chasse aux caribous à la Baie-James. C’est à ce moment que j’ai compris ce que voulait dire sortir de sa zone de confort ! Pour ce qui est de l’amour des voyages, je crois que c’est mon premier voyage humanitaire fait avec mon école secondaire. Un vrai déclic pour la découverte ! Mon désir de voyager avec ma famille s’est cristallisé en voyant une famille avec 4 enfants voyager en sac à dos au Guatemala. Wow ! Je voulais faire ça avec mes enfants plus tard.
FG Quelle a été ta première aventure en famille ?
Déjà 4 jours après la naissance de Bastien, j’allais faire une belle marche hivernale au parc municipal. Je crois que déjà, lors de cette petite marche, j’étais en train de poser la première pierre de ma fondation de maman. La vie continue même avec un enfant, suffit de s’organiser et d’être en confiance. Nos enfants nous suivent sans hésitation en se collant à nos émotions. Si tu stresses et que tu es anxieux de partir, ton enfant va le ressentir. Il faut alors faire des aventures à la hauteur de nos compétences afin d’être confortable et d’inspirer confiance à nos petits.
Donc après un hiver d’une trentaine de randonnées de raquettes et de ski de fond avec notre fiston bien emmitouflé entre ses deux bouteilles d’eau chaude, je suis partie faire un 5 jours sur le sentier de pèlerinage du Saguenay (Katapakan) avec ma mère et mon gars dans le sac à dos. Bastien avait alors 6 mois. Ensuite, nous avons fait un 5 jours de vélo allant d’un ami à l’autre sur la véloroute en Estrie. Une magnifique expérience. Comme toutes nos petites aventures en famille se déroulaient bien, nous sommes partis faire une semaine de canot-camping en autonomie totale.
FG Comment décrirais-tu ton style d’aventures ?
Avec des enfants, le simple fait de se retrouver en mode découverte en nature suffit pour nous combler. Donc l’intensité du sport ou les distances parcourues n’ont plus aucune importance. Nous ajustons nos itinéraires à la baisse pour nous laisser le temps de vivre et d’être.
En vélo, nous prévoyons des distances d’une moyenne de 55km par jour, ce qui nous laisse le temps de faire de belles pauses aux bords des rivières, jouer dans un parc, arrêter au marché et arriver pas trop tard à destination. Ensuite, en canot, nous préférons les endroits ne nécessitant pas de réservations de camping à l’avance afin de garder la spontanéité d’arrêter jouer sur une plage si on le veut et monter le campement pendant que c’est encore le fun ! Puis en ski de fond, nous cherchons toujours un itinéraire avec un refuge à mi-chemin pour faire une belle et longue pause dîner lors de laquelle je peux allaiter et dégourdir les gars.
- Devise 1 : Il faut toujours garder en tête que la sortie doit être plaisante et donner le goût à nos enfants d’y retourner.
- Devise 2 : Arrêter lorsque c’est encore le fun!
FG Tu es partie en canot pour une semaine avec Bastien alors qu’il avait 8 mois. Qu’est-ce qui t’a le plus surprise ?
L’adaptation totale de notre garçon dans cette variété de décors et d’expériences. Tantôt il jouait dans le sable sur la plage, tantôt il dormait pendant les déplacements dans un hamac accroché dans le canot, tantôt il s’endormait au son du feu dans nos bras, emmitouflé dans sa couverture. Bastien a adoré son voyage et nous aussi. Nous vivions une vraie expédition, et ce avec un enfant, tout simplement.
Comme je le disais plus tôt, nous avions pris soin de tester sa réaction et la nôtre lors de plus petites aventures avant de partir dans une forêt sauvage au nord de la communauté autochtone de Manawan. Nous avons également une bonne connaissance des rudiments du canot, de la météo et de la logistique du camping sauvage. Nous sommes partis à deux canots pour trois raisons, la sécurité, des bras supplémentaires pour s’occuper d’un bébé et le plaisir d’être avec des amis et ma mère.
FG Avez-vous rencontré des défis pendant l’expédition ? Comment les avez-vous surmontés ?
Les questions que je me posais avant de partir étaient, comment allons-nous gérer les siestes, le soleil sur le canot, les temps de repas, dois-je apporter des médicaments et la gestion des couches sur cette période.
Pour les siestes en canot, j’avais installé le hamac de mon chariot de vélo dans la pointe avant d’un canot afin de créer une sorte de suspension à vagues et un effet balancier pour l’endormir. Bien fière de ma réussite, il s’endormait maximum deux minutes après nos départs ! Avec des pinces, j’ai installé un paréo au canot pour couvrir Bastien du soleil. Pour le protéger du soleil rendu sur nos campements, j’avais acheté une petite tente faite pour ça et qui se monte toute seule (100$). C’était bien parfait et je l’utilise aussi à la maison. Maintenant, pour le temps des repas et les temps où nous ne pouvons pas l’avoir dans nos bras, nous utilisions un jumpa, une sorte de chaise portative que nous avions.
C’est le genre d’équipement dont tu peux te passer, mais que tu trouves bien pratique quand tu l’as ! Une grande toile par terre aurait aussi fait le travail. Pour les médicaments, j’avais apporté de l’Advil et du Benadryl (réactions allergiques) pour enfants. Si une situation avait demandé un rapatriement, nous aurions arrêté un des bateaux qui passaient quotidiennement pour aller pêcher. Un appareil satellite est également une belle option lorsque nous sommes en zone sauvage. Pour terminer: la gestion des couches !!! J’avais un inventaire de 5 couches lavables et une douzaine de couches jetables pour les nuits et back-up. Donc le jour nous utilisions les couches lavables, que nous lavions lors de nos arrêts et laissions sécher au soleil sur le canot. C’était parfait.
FG Tu as maintenant deux enfants et vous faites encore régulièrement des aventures en famille. Qu’est-ce qui a changé dans la planification ?
Ce qui change c’est justement ça, la planification pour les enfants. Les itinéraires sont toujours adaptés pour maximiser le plaisir de la sortie et limiter les contraintes d’objectifs de destinations. On s’adapte aux rythmes des enfants avant tout, tout en maximisant nos déplacements pendant les siestes et prendre du temps pour les laisser jouer dehors lors des temps d’éveil. Il faut garder en tête que, souvent, lorsqu’on parle d’aventure pour les parents, ils sont davantage sédentaires, assis dans une remorque, un siège de vélo ou dans un canot, il est donc important de faire un voyage qui bouge pour eux aussi.
Nous avons toujours avec nous des objets stratégiques pour les enfants. Des jouets et livres trainent partout sans oublier mon fameux plat de plastique de cuisine pour apporter des restes de table qui me servent de collations rapides lorsque nécessaire. Un sac de céréales pour enfants est aussi toujours dans notre valise. Elles sont très légères et non périssables. Un peu d’eau dans notre plat et le tour est joué.
Avec deux enfants nous priorisons le vélo et les sports qui glissent (canot, ski de fond). Le portage en randonnée est rendu plus difficile pour les parents ! Pour continuer le canot avec deux enfants, dont un qui marche maintenant, nous nous sommes équipés d’un outil formidable et même essentiel pour une sécurité minimale selon nous, ce sont des flotteurs stabilisateurs pour canot. Notre canot devient donc un trimaran avec un flotteur rétractable de chaque côté de l’embarcation. Cela empêche toute possibilité de dessaler (chavirer) en canot avec deux enfants, une aventure que je ne souhaite vraiment pas de vivre !
FG Bastien et Éloi ont plusieurs aventures à leur compte. Est-ce que tu remarques une évolution sur comment ils vivent leurs expériences ?
Depuis qu’ils sont nés que nous partons souvent en forêt faire de petites aventures. Ils sont donc habitués à s’adapter à de nouveaux environnements. La stabilité qui est la plus importante dans tout ça c’est nous, les parents. Le reste ce n’est pas grave. Nous devons donc être là, présents, rassurants et disponibles pour répondre à leurs besoins du moment. Nous devons rendre le tout amusant et sécurisant afin de leur donner toute la disponibilité d’être en apprentissage et en découverte. S’ils se sentent en sécurité, c’est l’essentiel pour avoir du plaisir et dans le plaisir il y a les apprentissages de la vie.
Jouer en forêt n’est pas un simple divertissement, c’est l’outil le plus complet qu’il soit pour faire grandir nos enfants sainement et de façon optimale. Lorsqu’un enfant marche en forêt, saute un ruisseau, écoute un oiseau, s’amuse sous la pluie ou se crée un jeu avec une branche et des roches, il en est train de bouger activement, de développer sa curiosité pour son environnement, d’utiliser sa créativité, de vivre des liens sociaux sains, de délaisser les technologies, de développer ses 5 sens et sa motricité globale, de prendre confiance en lui et en ses capacités, de reconnaître ses limites et il libère son énergie accumulée à travers le jeu.
Toutes des façons naturelles de réduire et d’enrayer l’hyperactivité, la sédentarité, la dépendance aux technologies, les comportements turbulents et agressifs, les troubles du sommeil, l’embonpoint, etc. Le contact avec la nature est pour nous une façon de grandir et de penser, une façon de vivre une vie riche et stimulante.
FG En terminant, des conseils pour les apprentis aventuriers en famille qui hésitent encore à se lancer ?
Lancez-vous une petite aventure à la fois. Partez en vélo deux jours avec une nuit dans une auberge. Allez faire du camping dans un parc Sépaq. Ne partez pas loin de la maison pour faire des tests et gagner en confiance. Trouvez sur Kijiji un chariot, plutôt qu’une poussette dispendieuse. Cet outil formidable vous ouvrira la porte de plusieurs sorties possibles. Empruntez du bon matériel de camping à un ami ou en louez plutôt que de prendre du matériel de piètre qualité qui risque de nuire à votre expérience.
Inspirez-vous via de belles sources d’informations sur le sujet comme Ti-Mousse dans brousse ou des groupes Facebook sur les aventures en famille. Suivez des blogues de voyageurs en famille. Mettez spontanément une date et une activité au calendrier et réalisez seulement le lendemain que vous devez maintenant la préparer. Vous verrez qu’une fois dans l’organisation tout semblera plus accessible ! Bref, lancez-vous avec confiance et les enfants suivront !
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C’était passionnant de lire l’article. Merci à vous d’avoir partagé le vrai goût d’une aventure, sans oublier ces belles photos.
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